Vous avez créé l'acceptation de l'autisme en avril 2011. Racontez-nous pourquoi vous avez lancé ce mouvement et pourquoi vous avez choisi de parler d'acceptation et non de sensibilisation. Pourquoi est-ce important ? Quelles différences cela fait-il ?
J'ai choisi le thème de l'acceptation parce que celui de la « sensibilisation » avait déjà été testé. Chaque année, en avril, et ce depuis des années, des personnes autistes travaillent d'arrache-pied pour préparer la campagne offensive « Sensibilisation à l'autisme : plus fréquent que le cancer pédiatrique, le diabète et le SIDA ! » (un message aux conséquences limitées mais suffisamment angoissant pour alarmer les moins concernés. En 2009, la vidéo intitulée « Je suis l'autisme » (I am Autism) a été lancée sur fond de musique de film d'horreur et une voix-off quelque peu suspecte. Une année, on a découvert 150 poussettes vides sur le campus d'une université. Les étudiants autistes ont dû contourner l'obstacle pour aller en classe. Ce symbole signifiait peut-être que nous n'étions plus compris des parents dont l'enfant était autiste ou bien que « n'avions rien dans la tête » (ce que certaines personnes pensent des autistes, d'ailleurs).
Des commentaires du type « Nous ne sommes pas encore en avril et j'ai déjà hâte que ce soit fini » étaient fréquents au sein de la communauté des personnes autistes. Pendant ce temps là, ceux qui ne souffraient pas d'autisme se ruaient sur les ampoules bleues et les événements dont l'objectif était de montrer à quel point il était terrible d'être le parent d'un enfant autiste. A l'époque, les recherches étaient focalisées sur la « prévention et la découverte d'un remède » ; et elle le sont encore. Nous devions attendre le début du mois d'avril pour « savoir à quelle sauce nous allions être mangés », puis survivre jusqu'à la fin du mois pour pouvoir, dès le 1er mai, enfin respirer et pousser un « ouf » de soulagement. De nouvelles statistiques alarmantes sur la « prévalence de l'autisme » étaient publiées au début du mois, alimentant des débats à n'en plus finir pour savoir pourquoi les chiffres avaient changé. À la fin, « tout le monde » était encore plus inquiet que l'année précédente.
Pendant quelques années, j'ai fait partie de ceux qui redoutaient l'événement. Après cela, je me suis dit: « Terminé. J'en ai assez ». J'aime bien prendre les devants. J'en avais assez d'attendre de voir ce que « l'autre partie » avait à proposer. De plus, je ne voulais pas être contrainte de défendre, chaque année, une position réactionnaire. Je ne voulais pas non plus que l'événement se déroule à chaque fois selon les directives des personnes non-autistes. Je voulais éviter tout ce qui est susceptible d'engendrer de la négativité et créer, pour nous, quelque chose d’extrêmement positif.