Le respect de la vie privée en CAA

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L'intimité compte beaucoup, surtout lorsqu'il s'agit de communication. J'aimerais pouvoir dire que nous savons tous à quel point l'intimité des individus est un paramètre important à prendre en compte dans l'enseignement de la CAA. Mais, je ne sais pas si c'est vraiment le cas. J'en suis venue à me poser cette question, en essayant de savoir si les systèmes de CAA étaient intrinsèquement impersonnels. (Révélation : ils le sont souvent mais pas de manière intrinsèque.)

Comme la majorité des adultes, je pars du principe que les autres ne doivent pas lire mes correspondances ni fouiller dans mes affaires. Mon iPad et mon ordinateur portable sont à moi. Personne ne peut les toucher sans ma permission.

Ma règle « pas touche » peut sembler peu pratique pour un jeune utilisateur de CAA, en plein apprentissage, ou pour quelqu'un qui a besoin d'aide dans l'utilisation de ces appareils. Cependant, nous pouvons leur enseigner l'intimité et l'autonomie et leur faire comprendre que la CAA est leur voix personnelle. Cela commence par définir précisément qui a l'autorisation de toucher à leurs appareils et ce que chacun a le droit de faire avec. Vous devez respecter ces limites.

Pensez à la modélisation. Oui, la modélisation est importante ! Mais, vous ne devez pas partir du principe que vous pouvez modéliser librement sur mon appareil. Chacun a ses préférences. Celles-ci sont basées sur un certain nombre de critères. Non, vous ne pouvez pas prendre mon ordinateur portable pour modéliser. Dans mon ordinateur, je dispose de données de recherche qui doivent rester confidentielles. Alors, si vous devez modéliser avec un programme de CAA sur ordinateur portable, vous devez vous procurer un autre ordinateur équipé de la même application. J'aimerais évidemment que vous fassiez la même chose pour mon iPad. Si vous voulez m'apprendre à utiliser mes appareils ainsi que les applications de CAA, vous devez toujours me demander la permission avant de les manipuler. Je vous demande d'avoir la gentillesse de toujours respecter ce souhait. Si quelqu'un utilise mon appareil sans me demander la permission, même si je lui ai demandé de ne pas le faire, alors cet appareil n'est plus vraiment le mien.

Pensez aux phrases pré-enregistrées : Mon dossier « A propos de moi » me propose des phrases pré-enregistrées pour ce qui concerne mon adresse personnelle et professionnelle, mes numéros de téléphone portable, ma ville et mon e-mail. Les dossiers « Informations de santé » et « soins personnels » me proposent des phrases pré-enregistrées à l'attention des médecins ou des personnes chargées de nous aider ! Réfléchissez à la quantité d'informations personnelles qui figurent dans l'appareil. Quel serait la conséquence si d'autres personnes (des enseignants, par exemple) pouvaient modéliser directement sur nos appareils ? Ils auraient, eux aussi, accès à ces informations. (Nous pouvons décider, pour nous-mêmes, que nous souhaitons conserver ces information dans notre appareil sans que d'autres personnes ne décident à notre place). Je ne veux pas que mes professeurs aient accès à ces informations ! Ils ne sont d'ailleurs pas habilités à connaître les détails de mes diagnostics. Je ne souhaite pas forcément qu'ils en prennent connaissance en modélisant sur mon appareil. De la même manière, je peux également ne pas vouloir que la personne en charge de la programmation de mon appareil prenne connaissance de ces informations.

À propos de la lecture de l'historique de nos messages. Gardez à l'esprit que le fait de savoir si j'ai besoin d'un appareil et s'il fonctionne bien rentre dans le cadre de la collecte habituelle de données. Des personnes peuvent donc avoir accès à mes informations personnelles. Même si les informations stockées ne sont pas sensibles, nous ne souhaitons pas que nos parents sachent tout de ce que nous disons à nos professeurs, et vice versa. Même les réponses qui figurent dans l'historique des messages, je souhaite les garder pour moi, et éviter qu'ils puissent les consulter en modélisant sur mon appareil. Si j'insulte quelqu'un, par exemple, mes responsables ne devraient en avoir connaissance que s'ils m'entendent ou si quelqu'un leur rapporte mes propos. Et non parce qu'ils disposent d'une liste contenant les détails de mes échanges. L'utilisation de la CAA ne devrait pas être synonyme d'un manque d'intimité ou d'autonomie.

Même des choses insignifiantes comme les variations de volume affectent l'intimité ! Les réglages de mon appareil qui me permettent d'être entendue à travers la classe ne me permettent pas forcément de chuchoter à l'oreille de mon voisin ou de ma voisine. J'ai résolu le problème partiellement en utilisant uniquement la CAA textuelle. Malheureusement, cela ne fonctionne pas si je me trouve bloquée dans une application prévue pour prononcer tous les mots ou toutes les phrases que je tape. Nous devrions enseigner aux étudiants comment ils peuvent avoir la même intimité qu'une personne qui a la capacité de moduler sa voix.

Sans cela, nous apprenons simplement à faire abstraction de l'intimité (ou de l'autonomie, si nous ne sommes pas entendus lorsque nous demandons à avoir de l'intimité). Est-ce vraiment cela que vous souhaitez nous apprendre au sujet de l'intimité et de l'autonomie ? Qui peut avoir une voix bien à lui ?

Lecture complémentaire:

  • L’article, Augmentative and Alternative Communication for Speaking Autistic Adults, est publié dans Autism in Adulthood
  • Vous trouverez l’article concernant l'enseignement à l'aide de la CAA sur Academia.edu
  • Vous pouvez consulter le blog personnel d'Alyssa Yes, That Too
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